Bruxelles, le 7 octobre 2020

La Commission adopte un paquet de mesures concernant l’égalité de traitement entre femmes et hommes pour les postes d’encadrement prévoyant notamment: 

  • La multiplication des couches hiérarchiques en introduisant dans CHAQUE DIRECTION la nouvelle fonction d’ « adjoint au Directeur », et en rendant obligatoire dans CHAQUE UNITE celle de « chef d’unité adjoint » 
  • La « centralisation » de la procédure de nomination pour des postes d’encadrement supérieur

Le dialogue social porté disparu : avis de recherche !

Il convient d’emblée de constater que des mesures aussi importantes ont été adoptées sans la moindre discussion ou information de la représentation du personnel.

Ceci est le nouveau visage du Dialogue social auquel la DG HR semble vouloir de plus en plus se livrer laissant entendre que les discussions avec les OSP seraient une corvée pénible dont il convient de se passer autant que possible.

Il est d’ailleurs significatif que ce paquet de mesures ayant un impact incontestable sur la politique du personnel de notre institution, sur les conditions de travail et les perspectives de carrière des collègues, ait été adopté sans nullement attendre les résultats des consultations tous azimuts en cours sur la « modernisation de la gestion des RH ».

Ceci ne peut que renforcer les craintes exprimées par R&D quant à la prise en compte des avis des collègues et sur les véritables finalités de cet exercice (lien

En effet, l’alourdissement des procédures de gestion au sein des services qui résultera inévitablement de certaines de ces mesures imposées sans la moindre consultation, est en contradiction claire avec la volonté de simplification affichée par la DG HR et n’est compatible :

  • ni avec les résultats de tous les staff Survey démontrant la démotivation du personnel face à la multiplication des couches hiérarchiques,
  • ni avec la nouvelle « culture de la confiance » annoncée par le Commissaire Hahn,
  • ni encore avec l’évolution vers une administration plus « agile », cassant les silos valorisant la co-création que la DG HR prône par ailleurs dans le cadre des consultations effrénées en cours sur la « modernisation de la gestion des RH »

R&Dsoutient avec conviction la politique en matière d’égalité entre les femmes et les hommes ! Mais cela ne se limite pas à la seule répartition des postes d’encadrement

À cet égard, nous avons salué l’engagement de la Présidente de parvenir à l’objectif fixé d’ici la fin de son mandat concernant la répartition des postes d’encadrement de façon équitable entre les femmes et les hommes. Ceci même s’il convient de le répéter une énième fois : la prise en compte des droits et des attentes de nos consœurs ne se limite certainement pas à ces seuls aspects.

Or, s’il est appréciable que la Commission ait cessé de se limiter à des slogans vides, les mesures adoptées en l’espèce sont-elles les mieux adaptées pour poursuivre ces finalités ? Qu’il nous soit permis d’en douter.

Le paquet de mesures adopté par la Commission : l’analyse de R&D

La multiplication des niveaux hiérarchiques : vers une « armée mexicaine » ou plutôt à la façon « Tintin » ?

1) Au sein de CHAQUE Direction de notre institution sera dorénavant désigné un « adjoint au Directeur »

La Commission a ainsi chargé tous les directeurs généraux d’établir avant le 31 octobre prochain, en accord avec leur commissaire de tutelle, une liste désignant pour CHAQUE poste de directeur un chef d’unité qui en assurerait la suppléance. Cette liste devrait comprendre, en principe, au minimum 55% de femmes.

Les chefs d’unité ainsi désignés en l’absence de tout critère clairement établi et de toute procédure formelle de nomination figureront dans l’organigramme sous l’appellation « adjoint au directeur ».

À cet égard, nous partageons les réserves émises quant à la confusion instaurée entre, d’une part, les règles objectives régissant l’exercice de la suppléance et, d’autre part, une procédure de nomination permettant l’accès à un poste d’encadrement dans l’organigramme.

Qui plus est, comme si cela ne suffisait pas, une nouvelle couche s’ajoute à l’échelle hiérarchique. Alors que la procédure de désignation des chefs d’unité adjoint n’est pas toujours transparente, celle désignant les « adjoints au directeur » sera tout simplement inexistante !

Dans ces conditions, l’intronisation de ces « super chefs d’unité » décidée par le simple « fait du prince » risque de créer des tensions au sein des Directions au détriment du bon fonctionnement du service. Les premières informations et messages outrés que nous recevons confirment tout le bien fondé de ces craintes. 

2) Au sein de CHAQUE Unité de notre institution sera dorénavant désigné « un chef d’unité adjoint »

Les directeurs généraux devront veiller à ce que ces fonctions soient exercées en respectant la parité entre les hommes et les femmes d’ici la fin 2022.

Concernant les postes de chefs d’unité adjoints, ceux-ci ne sont même pas repris dans les organigrammes engendrant une confusion croissante et des pratiques absolument divergentes à travers les Directions générales quant aux tâches qui leur sont déléguées ainsi que les modalités de leur désignation. Qui plus est, certains chefs d’unité veulent bien être « assistés », d’autres refusent toute ingérence dans leur « petit royaume ».

Un peu comme dans les albums de Tintin où les militaires sont bardés de médailles : on multiplie les titres et le surcroît risque d’être un gage d’inefficacité.

Cette multiplication artificielle et systématique des fonctions dans l’échelle hiérarchique ne prend pas compte des véritables besoins opérationnels de chaque service et ne s’accompagne pas d’une véritable harmonisation de leur taille. Ainsi, au sein des « nano unités » ou des « nano directions », les « décisionnaires » seront presque plus nombreux que « les exécutants ».

Allons-nous vers une organisation constituée d’une multitude de couches hiérarchiques, d’une panoplie de « décisionnaires » et d’un manque cruel de combattants » ?

Nous partageons les craintes déjà exprimées qu’au sein des services les collègues, plutôt que d’accomplir leurs tâches, soient amenés à passer encore plus de temps à jongler entre une multitude de niveaux hiérarchiques, souvent en conflit ou en contradiction entre eux, avec des fiches Ares à rallonge contenant une panoplie d’accords et de visas à recueillir imposant chaque fois aux collègues des efforts d’explication épuisants et démotivants.

La multiplication des couches hiérarchiques est d’ailleurs reconnue par les experts comme étant une source de stress au travail et de risques psychosociaux.

Devant le nombre de décideurs et la multitude d‘instructions le risque est que les services se trouvent ainsi désorganisés et empêtrés dans des directives contradictoires.

« La centralisation » des procédures de nomination

« Afin de rationaliser certains aspects de la procédure de sélection des membres de l’encadrement supérieur et afin de garantir la fluidité et la rapidité des procédures » la Commission a décidé que quatre des membres permanents du comité consultatif des nominations (CCN)1, donneront des avis, soit lors d’une réunion organisée au moins une fois par mois, soit par procédure écrite, sur :

  •  toutes les demandes de publication de postes vacants
  • et
  • ·sur l’opportunité de procéder à des entretiens en CCN et avec quels candidats, la présélection demeurant soumise à révision jusqu’à ce que l’avis soit rendu.

Il s’agit d’un changement majeur dans la gouvernance des procédures de nominations!

Il est appréciable que la Commission abandonne enfin son attitude ayant jeté le discrédit sur notre Institution, prétendant défendre aveuglement les procédures actuelles alors qu’elles ont déjà largement démontré toutes leurs limites.

Néanmoins, les mesures adoptées en l’espèce sont-elles les mieux adaptées ?

Les véritables réformes des procédures de nominations demandées par R&D

R&D demande depuis toujours une réforme profonde des procédures de nomination pour améliorer la transparence et mettre fin à la pratique détestable des parachutages et plus largement à la politisation croissante de ces nominations.

Dans ce contexte, nous avons soutenu les demandes de réforme profonde de ces procédures que le Parlement européen et la Médiatrice européenne ont aussi récemment adressées à la Commission et que notre Institution a rejeté en se livrant à la défense autant aveugle que risible du statu quo en prétendant même « respecter religieusement la lettre et l’esprit du statut ». 

Nous n’avons eu cesse de rappeler que compte tenu des responsabilités importantes qui sont confiées aux membres de l’encadrement et des conséquences parfois dramatiques qu’un mauvais manager peut infliger aux collègues placés sous sa responsabilité, il est essentiel de mettre en place des procédures transparentes et crédibles garantissant l’égalité de traitement de tous les candidats, bâtissant le choix sur des critères clairs répondant uniquement aux besoins de notre institution et permettant de respecter l’engagement de toujours nommer « la bonne personne à la bonne place ».

Mais cela ne suffit pas : il faut aussi prévoir des procédures équitables et efficaces permettant de redresser sans tarder les décisions qui se seraient avérées erronées en commençant par mettre en place une véritable procédure d’évaluation à 360° bien loin du semblant actuel, et qui soit crédible.

Ainsi, concernant les mesures adoptées par la Commission, nous ne pouvons que saluer tout effort déployé pour assurer une meilleure cohérence de ces nominations et éviter des approches divergentes et des avis de vacances « à la tête du client » … pressenti.

Nous saluons aussi le constat à la base de cette centralisation reconnaissant que comme démontré dans un passé récent, la DG HR n’est pas en mesure d’assurer seule cette harmonisation et coordination.

Néanmoins, nous comprenons également les craintes exprimées sur cette « centralisation » concernant le danger de « main mise » totale au niveau central, ce qui priverait les autres Directeurs généraux ainsi que les autres Membres du collège d’une véritable influence concernant ces nominations. Au risque de procéder à des nominations déconnectées de la réalité et ne répondant pas aux besoins des services dont ces collègues seront pourtant chargés.

Il faut aussi absolument éviter de faire passer le message que seul un soutien « au niveau central » pourrait permettre d’accéder à ces postes et de garantir une évolution ultérieure de carrière.

Conclusion

R&D réaffirme son soutien convaincu à la politique en matière d’égalité des chances entre les femmes et les hommes.

R&D partage néanmoins toutes les réserves et les craintes au sujet de ce paquet de mesures, restera très attentif aux premiers résultats de leur mise en œuvre et ne manquera pas de faire état de tout dérapage avéré.

Cristiano Sebastiani,

Président

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La secrétaire générale (présidente), la directrice générale de la DG HR, le chef de cabinet de la présidente et le chef de cabinet du membre de la Commission chargé des ressources humaines,