La Commission fonce droit dans le piège du Conseil
Pour comprendre ce que 17 Etats membres demandent réellement à la Commission pour sa proposition de réforme du statut, on a besoin de lire entre les lignes. Voici un bref vade-mecum de la vision extrémiste/fanatique/zélée de l’avenir de la fonction publique européenne.
1. Méthode d’ajustement des salaires :
- La clause d’exception sera utilisée comme un outil discrétionnaire par le Conseil, année après année, pour bloquer toute augmentation de salaire s’il le souhaite. Un tel mécanisme reviendrait à se moquer de toute méthode et des principes sous-jacents de maintien à la fois du pouvoir d’achat et du parallélisme avec les salaires des fonctions publiques nationales. Au lieu de cela, les intentions du Conseil risquent de conduire à des négociations salariales annuelles et de briser la paix sociale en paralysant régulièrement les institutions.
2. Pensions :
- La base de calcul pour le montant de la pension reposera sur une moyenne des salaires durant toute la carrière au lieu de retenir le dernier salaire avant la retraite ;
- Augmentation de la contribution pour la pension malgré l’équilibre du régime de retraite de l’UE ;
- Augmentation de la part à la charge des employés des cotisations de retraite (actuellement 1/3) ;
- Elimination ou réduction de « l’incitation de Barcelone » pour le personnel travaillant au-delà de l’âge de la retraite, afin d’acquérir des droits à pension plus élevés pour ceux qui n’ont pas accumulé un nombre suffisant d’années de cotisation ;
- Elimination de la possibilité de retraite anticipée sans pénalité ;
- Fiscalité des retraites : 6 % au titre d’une « contribution de solidarité » prélevée sur les actuels et futurs retraités ;
- Découplage des pensions de l’adaptation des salaires et de la méthode pour le personnel actif (qui ne conduira certainement pas à un traitement plus favorable pour les retraités) ;
- Découplage des allocations familiales de l’adaptation des salaires et de la méthode.
3. Taxe de solidarité spéciale
Augmentation de la contribution de solidarité ;
Abandon du caractère progressive de cet impôt avec application à tout le personnel quelque que soit le revenu avec diminution des salaires les plus bas;
4. Structure des carrières
- Elimination du principe du mérite dans le temps ;
- Elimination de l’annexe IB (taux de promotion garantis) ;
- Promotion uniquement sur candidature à un poste vacant à un grade supérieur ;
- Blocage des carrières AD pour les personnel hors encadrement ;
- Limitation de toutes les carrières AST ;
- Fonction de secrétaire supprimé au profit d’agents contractuels ;
5. Allocations
- Diminution de l’indemnité d’expatriation de 16% à 10%.
6. Actes délégués
Pour la mise en œuvre d’une future méthode et son calcul, le Conseil souhaite refuser d’accorder à la Commission l’utilisation d’un « acte délégué » en application de l’article 290 du Traité sur le fonctionnement de l’UE (Traité de Lisbonne). Cette disposition garantit une mise en œuvre rapide de règles juridiquement contraignantes dans le cas où un principe de base (la méthode et son calcul) ne nécessite qu’un ajustement technique prédéfini. Le Conseil réaffirme une fois encore qu’il souhaite se prononcer sur une base au cas par cas chaque année, qu’il veuille ou non respecter les exigences légales d’une méthode d’adaptation salariale convenue.
Les négociations entre la Commission et les Représentants du Personnel, si brutalement rompues par le Vice-Président Sefcovic 16 novembre 2011, ne portaient que sur la proposition de la Commission, la première étape dans le processus législatif. La vraie bataille avec le Conseil et le Parlement est encore à venir.
Le document joint donne une idée de ce à quoi il faut s’attendre.
La semaine prochaine la Commission Barroso se présentera dans la fosse aux lions sans l’appui du personnel des Institutions européennes. Cette approche erronée risque d’aboutir à des résultats très décevants pour tous, mettant en péril à moyen terme le projet de l’UE.