Le jury doit rester au centre de la procédure de sélection
En rendant son arrêt dans l’affaire Pachtitis, le Tribunal a remis au centre de la procédure du concours, le rôle central de la représentation du personnel dans le jury et la place de ce jury dans la procédure de concours.
R&D se félicite d’avoir trouvé dans le tribunal un allié institutionnel de poids pour dénoncer les limites d’un système introduit par Kinnock et sa bande pour limiter les prérogatives et affaiblir la Commission, externaliser certains éléments clés des procédures administratives, remettre en cause le multilinguisme de notre fonction publique européenne et affaiblir la représentation du personnel. Avec cet arrêt, le tribunal donne un petit coup de frein à la politique des coupures budgétaires sans discernement et replace au centre de la politique du personnel des institutions la politique de recrutement de son personnel.
R&D poursuit son combat
Le contexte
EPSO a été voulu et créé par Kinnock essentiellement pour générer des économies d’échelle dans les procédures de sélection des différentes institutions mais aussi – soyons honnêtes – pour remettre un peu d’ordre dans certaines procédures devenues quelque peu folkloriques, sources d’un contentieux juridique important et dont certains ont fait la risée de toute la presse européenne. Cependant la recherche perpétuelle d’économies pour faire plaisir aux Eurosceptiques, la volonté de l’ancienne direction d’EPSO de mettre les représentants du personnel en dehors de la procédure sous prétexte de « modernisme » et le manque de moyens financiers et humains accordés à ce nouvel office ont été tels que:
1) des éléments essentiels de la procédure ont été confiés à des sociétés externes notamment toute la phase d’inscription, de présélection, d’accueil des candidats, de gestion du secrétariat …
2) le rôle du jury a été limité à des tâches qui ne pouvaient pas être confiées à des ordinateurs, la parité des jurys n’a pas pu toujours être respectée faute de membres de jury en nombre suffisant, l’absence de reconnaissance suffisante de la part de la DG des tâches accomplies dans l’intérêt de l’institution,…
3) que certains tests ont été changés afin de les rendre compatibles avec le computer based testing en passant sous silence les origines, l’identité, la culture, l’histoire et le fonctionnement et des finalités de l’Europe;
4) la limitation à trois langues de tests au mépris du multilinguisme et de la richesse culturelle…
5) la crédibilité de l’office à conduire des procédures de sélection sérieuses a été sérieusement remise en cause par certaines institutions dont le Parlement européen
6) l’absence de toute transparence des épreuves de présélection, les candidats ne pouvant obtenir de manière intelligible le corrigé de leurs épreuves
Si les revendications de R&D sur le multilinguisme ont rencontré un écho favorable auprès de la nouvelle direction de EPSO et qu’elles se sont soldées par la publication des avis de concours en 25 langues, l’engagement de produire des tests sur ordinateurs dans un nombre croissant de langues communautaires, et d’élaborer des tests professionnels dans la langue principale du candidats etc la logique purement économique imposée par l’autorité budgétaire et les Etats membres a empêché tout autre progrès … jusqu’à l’arrêt Pachtitis.
Pachtitis: les faits
Le 15 juin dernier, le Tribunal de la fonction publique a statué dans l’affaire F 35/08, Pachtitis/Commission, en faveur de M. Pachtitis. M. Pachtitis – candidat à un concours organisé en 2006- 2007 en vue d’établir une liste de réserve de traducteurs de langue grecque (AD 5) – estimait qu’il n’aurait pas dû être exclu du concours sur la base des résultats qu’il avait obtenus aux tests de présélection. En effet, ces tests avaient été élaborés exclusivement par l’EPSO pour ce concours en particulier sans aucune participation du jury de concours. Le Tribunal a conclu que seul le jury de concours, et non l’EPSO, est et que par conséquent, les habilité à choisir les questions qui figureront dans les tests de présélection résultats obtenus par M. Pachtitis ne pouvaient être déclarés valides.
Pachtitis: un arrêt historique
L’affaire F 35/08, Pachtitis/Commission est un arrêt historique qui remet partiellement l’église au milieu (au moins sur le fait qu’EPSO doit être au service du jury et non l’inverse) et confirme toute du village l’actualité de notre statut et des batailles que R&D a menées pour le faire respecter. R&D attire l’attention sur le fait que ses représentants dans le Conseil d’Administration d’EPSO, COPAR et COPARCO, dans les Jury Permanents, dans toutes sortes d’enceintes n’ont jamais cessé d’inviter EPSO et la DG HR à respecter les droits statutaires des jurys, en évitant intrusions et soustractions de compétences non conformes aux règles statutaires. Sur le fond de l’arrêt il y a quatre aspects fondamentaux à souligner:
1) la confirmation claire de l’importance du paritarisme (administration – représentation du personnel) de la procédure et de la composition du jury en tant que seule solution pour garantir l’équilibre et contrer d’éventuels dérapages de l’administration ou EPSO. Le management du jury doit être renforcé, car il doit être en mesure de faire correctement appliquer les règles statutaires, en sauvegardant les principes de transparence et d’impartialité pour la sélection des candidats et délimiter les compétences respectives du jury ainsi que d’ d’EPSO
2) Le jury doit contrôler la procédure de A à Z. Grâce à l’action de R&D, le comité chargé en amont de garantir la qualité des questions CBT est devenu pleinement paritaire. L’exigence que des membres permanents des jurys siègent dans ce comité a pour but de renforcer notre action sans rien retirer aux prérogatives du jury qui doivent être défendues, en assurant un double contrôle et un processus plus cohérent.
3) Les tests de présélection sont un élément essentiel pour garantir l’égalité de chances et le multilinguisme, qui doit être largement renforcé dans l’organisation des concours, sans mettre à mal le rôle et les prérogatives du jury.
4) Le fric et l’euroscepticisme ne peuvent pas remettre en cause les principes statutaires et de droit. Pour R&D il ne peut pas et ne pourra jamais être question de décentraliser auprès des EM et/ou d’une société externe une quelconque phase de la procédure et encore moins la sélection toute entière. Cet arrêt confirme par ailleurs le bien fondé du soutien accordé par R&D à la démarche initiée récemment par EPSO de professionnalisation des membres de jurys.
R&D soutient les candidats qui ont été éliminés aux tests de présélection:
Dans l’état actuel de la jurisprudence, ces candidats sont en droit de voir leur candidature prise en compte pour les étapes ultérieures du concours. Pour préserver leurs droits, ils doivent, nonobstant l’engagement d’EPSO d’organiser un concours spécifique, introduire une réclamation contre la décision (voir notre modèle disponible sur notre site) leur communiquant le résultat au test et ce, dans le délai statutaire de 3 mois à compter du jour où ils en ont pris connaissance. EPSO dispose de 4 mois pour y répondre. Passé ce délai, le défaut de réponse vaut rejet implicite de leur réclamation. A ce stade, ils seront informés de l’éventuel pourvoi introduit contre l’arrêt Pachtitis (la Commission dispose de 2 mois à compter de la signification de l’arrêt, soit jusque la fin du mois d’août) et pourront saisir le TFPUE d’un recours en suggérant la suspension de la procédure dans l’attente de l’arrêt du Tribunal sur pourvoi.