Bruxelles, le 12 juillet 2016
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Vice-Présidents,
Mesdames et Messieurs les Commissaires,
C’est avec consternation que nous avons appris la nomination de l’ancien Président de la Commission, M. Barroso, en tant que conseiller et président non exécutif des activités internationales de la banque d’affaires américaine Goldman Sachs.
Toute la presse à travers l’Union européenne a rappelé le rôle de cette banque notamment dans la crise financière de 2007 et dans la crise grecque et a insisté sur les conséquences désastreuses vis-à-vis de l’image de la Commission et plus largement des Institutions européennes que provoque cette décision dans le contexte politique particulièrement délicat et europhobe du Brexit.
Le Personnel de cette Institution est ainsi victime d’une décision unilatérale alors que la simple décence n’aurait jamais dû conduire un ancien président de la Commission à accepter une telle fonction.
Pour autant, nous n’accepterons pas d’en rester là.
En premier lieu, nous sollicitons la position du Collège en application de l’article 245 du TFUE qui dispose que :
« Les membres de la Commission prennent, lors de leur installation, l’engagement solennel de respecter, pendant la durée de leurs fonctions et après la cessation de celles-ci, les obligations découlant de leur charge, notamment les devoirs d’honnêteté et de délicatesse quant à l’acceptation, après cette cessation, de certaines fonctions ou de certains avantages. En cas de violation de ces obligations, la Cour de justice, saisie par le Conseil, statuant à la majorité simple, ou par la Commission, peut, selon le cas, prononcer la démission d’office dans les conditions de l’article 247 ou la déchéance du droit à pension de l’intéressé ou d’autres avantages en tenant lieu. »
Et même si, en l’occurrence, la règle des dix-huit mois qui figure dans le Code de Conduite des Commissaires dans le cadre d’activités post-mandat a été respectée, l’article 1.2 dudit code stipule que « les devoirs d’honnêteté et de délicatesse visés à l’article 245 du TFUE restent d’application même à l’expiration de la période de dix-huit après la cessation des fonctions ».
En l’espèce, la compatibilité de l’acceptation de cette fonction au sein de Goldman Sachs avec les devoirs d’honnêteté et de délicatesse en application de cet article se pose clairement.
Au-delà de l’application de ces dispositions, nous voudrions souligner le déséquilibre criant entre le traitement réservé aux membres de la Commission et celui au Personnel de l’Institution en ce qui concerne la possibilité d’exercer des activités extérieures. Après avoir quitté le service, nous sommes toujours soumis à certaines obligations et, en particulier, nous devons continuer à agir avec intégrité et discrétion et ne pouvons pas accepter de tâches ou activités professionnelles qui seraient incompatibles avec les intérêts de l’institution en application de l’article 16 du Statut. En outre, les délais de latence auxquels nous sommes soumis (2 ans) sont plus longs que ceux qui incombent aux anciens membres de la Commission (18 mois) alors que leur degré de responsabilité est incomparable. A tout le moins, un traitement similaire devrait être garanti.
A cette fin et eu égard à la responsabilité politique et morale des membres de la Commission au regard de l’intérêt général et vis-à-vis des citoyens européens, nous vous demandons de revoir au plus vite les règles d’éthique sur l’engagement des plus hauts dirigeants de l’Institution afin qu’un tel précédent ne puisse jamais se reproduire.
C’est d’ailleurs la demande que vient de formuler le médiateur européen, aujourd’hui même.