Une nouvelle « réforme » des ressources humaines sous couvert de recentralisation
La DG HR a décidé de lancer une nouvelle réforme – même si elle ne porte pas ce nom – de la fonction RH qui consiste en la recentralisation des services alors qu’il y a dix ans l’exercice inverse avait été décidé.
Si l’intention est louable, la mise en œuvre laisse perplexe.
Certes R&D approuve et soutient la direction politique de cet exercice. En effet, R&D a dénoncé depuis longtemps la logique perverse et les effets désastreux des silos des DGs qui ont anéanti l’esprit de corps et d’appartenance à l’institution et à une fonction publique européenne unique. R&D a aussi dénoncé l’application à géométrie variable du statut et de ses règles d’application selon les DGs avec une DG HR incapable d’assurer la coordination et la gouvernance au niveau central. Pour autant, R&D réitère l’importance de la mission de proximité des RH au sein des services qui est et reste essentielle.
Là où le bât blesse c’est que cette nouvelle réforme est lancée sans analyse sérieuse ex ante de la situation. Elle avance sans dialogue social préalable et sans réponse aux nombreuses questions que les collègues se posent.
- Une approche purement quantitative
L’objectif de gains d’efficience et de synergies à atteindre est estimé à un ratio de 1:40 (1 personne s’occupe de 40 collègues) alors qu’actuellement ce ratio est de l’ordre de 1:29 en moyenne, si on compte la DG HR et PMO, par exemple (mais peut monter jusqu’à 1:60 dans certaines DG !).
Conséquence : réduction de 380 équivalents temps pleins d’ici 2019.
Actuellement 2200 collègues travaillent dans les RH.
Pour ce faire, les processus opérationnels seront réorganisés. Ceux qui sont caractérisés par des applications uniformes seront totalement centralisés. Des unités de gestion de comptes (AMC), 8 au total, seront créées au sein de la DG HR pour fournir à un groupe de DGs (8 au maximum) un soutien administratif dans la gestion journalière des RH. Chaque DG aura une fonction de correspondant opérationnel en matière de RH (avec 1 à 8 équivalent temps plein) pour les questions stratégiques.
Comment sont répartis les 2200 postes concernés? 55% dans le « corporate HR » (HR (553 postes), PMO (455), EPSO (139), CDP-OSP (47)), 34% dans les « local HR » et 11% dans les « corporate equivalent » (ex : service du Médiateur au SG, bureau des stagiaires à la DG EAC).
- Faire toujours plus avec toujours moins
Trouvez-vous qu’il y a trop de personnes au PMO actuellement avec la pression que ces collègues subissent dans ces services ? Pensez-vous que la demi-douzaine de personnes travaillant avec le Médiateur soit exagérée ? La réponse est clairement NON!
En ce qui concerne les services RH dans les DGs, ils représentent 34% des 2.200 postes, soit 748 équivalent temps plein.
La réforme vise à supprimer 380 postes, soit plus de 50% de réduction des effectifs RH dans les DGs.
- Des services déshumanisés
Pour pallier la réduction des ressources, de nouveaux services avec des réponses standard seront créés, le « e-SEP »(e-Single Entry Point). Un nouveau call-center ?
L’expérience désastreuse du PMO avec toutes les difficultés que l’on connaît pour avoir un contact et pour obtenir des réponses claires et rapides va se reproduire dans d’autres domaines.
Quelle qualité de service pourra être garantie ?
L’éloignement entre le « centre de traitement » et les demandeurs aura pour conséquence de ne pas prendre correctement en compte les préoccupations et de déshumaniser les ressources humaines.
Pourquoi aussi composer des AMC a priori de tailles identiques en tenant peu compte des spécificités locales ? N’aurait-on pas pu composer des AMC avec des nombres différents de DG en fonction des affinités réelles, adaptés aux besoins ? (et pas seulement en fonction de la localisation comme sur Luxembourg ou Ispra). Cette volonté de standardisation exagérée fera peu cas de l’humain…
- La DG HR navigue à vue
Il faut concéder à la DG HR d’évoluer constamment dans sa réflexion. Mais elle navigue à vue. Fin février, dans le document établi par les 22 directeurs généraux (en réalité 7 étaient présents à toutes les réunions), les AMC étaient composés de 23 secteurs (recrutement, career guidance, formation, éthique, promotion,…). Fin avril, il n’y en a déjà plus que 10.
Mi-avril, la DG HR lance un programme de workshops avec les unités RH pour essayer de comprendre comment et par qui les décisions doivent être prises. Or ce travail aurait dû être réalisé bien en amont. Et déjà le calendrier est remis en question.
Mais les projets pilotes démarrent ! D’abord à la DG HR, puis dans une même « famille de DGs » à l’automne 2016 et déjà même en juillet, les autres DG suivant début 2017 sur la base d’un appel à manifestation d’intérêt lancé dans les unités RH à l’automne 2016 pour recruter les futurs collaborateurs des AMC (« seront pris ceux qui sont motivés, compétents, et qui « travaillent dur »… » Est-ce à dire que les autres sont des fainéants ?). Ce qui veut dire que, fin d’année, ceux qui sont retenus côtoieront dans les couloirs des unités RH ceux qui ne le seront pas. Belle ambiance de Noël en perspective…
- Comment ne pas engendrer une démotivation des collègues ?
Pour la première fois, un chapitre est consacré au « risk management » dans le projet, pour prévenir les effets d’une démotivation des collègues (Comprenez : si la DG HR a prévu cette démotivation, c’est qu’elle est consciente des dégâts humains potentiels!). Des garanties sont obtenues : pas de mutation forcée, pas de création d’office, ni d’externalisation à terme des services, sans doute pas d’open space.
Mais trop de questions restent sans réponse.
Quel sera l’avenir proche de centaines de collègues, et en particulier les collègues de la catégorie AST et les AC qui seront les principaux concernés par la réforme ?
Qui sont les personnes concernées par la suppression des 380 postes ?
Comment seront sélectionnés les chefs d’unité et autres postes d’encadrement? Et quid de la mobilité?
Quelles sont les fonctions RH qui resteront dans les DGs?
Où seront logés les AMC et quelles seront les conditions de travail?
Quid des aménagements de temps de travail ? A titre d’exemple, des collègues peuvent prester 2 jours par semaine en télétravail dans une DG et pourraient se voir refuser cette possibilité du fait de la réorganisation.
Pour toutes ces raisons, R&D demande un encadrement strict de tout le processus via un dialogue constant et vigilant.
R&D invite les collègues des unités RH locales à envoyer leurs questions et faire part de leurs craintes.
R&D demande un accompagnement constant du personnel RH concerné, des réunions d’écoute et des formations adaptées.
R&D demande un haut niveau de qualité du service, une vraie relation humaine avec les personnes chargées des ressources humaines, un véritable contact pour répondre à toutes les questions des collègues en ce qui concerne tous les
aspects des ressources humaines.