LE GROUPE WILLIAMSON


R&D et le groupe Williamson: sa CONTRIBUTION AU RAPPORT INTERMEDIAIRE.

Les thèmes de réflexion qui concernent le groupe sont loin d’être nouveaux. D’une manière frappante, comme en attestent les documents fournis au groupe de réflexion aussi bien que des notes plus anciennes (rapports Spierenburg et Petit-Laurent entre autres), un certain nombre de similitudes avec ces derniers se vérifient:

- une remarquable convergence concernant le diagnostic : à des époques différentes, des personnes d’origines diverses font des critiques similaires concernant le fonctionnement de la Commission ;

- les propositions de changement mises en avant sont d’une ampleur limitée (en tout cas, pas à la hauteur des critiques formulées) ;

- une faible part des propositions sont effectivement mises en œuvre, avec un faible impact sur le fonctionnement de l’Institution, puisque quelques années plus tard un nouvel expert, quelle que soit son origine, fait le même constat que les précédents.

=> Il existe donc un cercle vicieux de la réforme ratée à la Commission, voire une très forte inertie. S’il veut faire preuve d’un minimum d’ambition, le premier objectif du groupe de réflexion mis en place après la grève du 30 avril 1998 devrait être de surmonter cet immobilisme tenace afin de moderniser le fonctionnement des services de la Commission sans toucher à ses trois piliers (indépendance, compétence et permanence).

Dès la phase de réflexion, le personnel doit être associé et mobilisé en faveur des changements qui seraient reconnus comme nécessaires.

Réforme de la Commission et réforme du statut

Depuis de nombreuses années, c’est un lieu commun que de considérer les statuts des fonctions publiques comme des obstacles à la modernisation. Ce discours vise, en fait, à faire porter sur les fonctionnaires eux-mêmes la responsabilité des dysfonctionnements administratifs, pour ne pas avoir à s’attaquer aux véritables causes de rigidité ou d’archaïsme, qui abondent aussi bien dans les administrations nationales que communautaire.

Comme d’autres fonctions publiques, la Commission n’a donc pas échappé à une tentative de « diabolisation » du statut. C’était également un bon moyen de fragiliser l’Institution en vue d’amoindrir son rôle, de la « normaliser » afin qu’elle se comporte désormais comme un auxiliaire docile des gouvernements des Etats membres (premier pilier : son indépendance).

Il est donc particulièrement grave de constater que cette attitude s’est répandue à l’intérieur de l’Institution elle-même, avec les conséquences catastrophiques qu’on a pu observer en matière de perte de confiance du personnel dans ses autorités. Or, la confiance est l’une des rares composantes absolument indispensables pour améliorer le fonctionnement interne (qui peut être valorisé si la hiérarchie est cohérente avec le deuxième pilier : la compétence).

L’un des meilleurs moyens de défendre l’Institution est de moderniser et d’améliorer son fonctionnement pour répondre aux nombreuses critiques, malheureusement justifiées qui se sont développées au cours des dernières années. Ceci dépend en grande partie de mesures internes et donc d’un accord entre la Commission et son personnel pour y adhérer et les mettre en œuvre.

=> Il est donc nécessaire de prendre des mesures pour restaurer cette confiance, par exemple, en indiquant clairement et publiquement les objectifs du groupe de réflexion, indépendamment de toute modification du statut, qui d’ailleurs ne pourra être envisagée avant d'avoir exploité tous les moyens statutaires existants.

Méthode Recommandée au Groupe de Réflexion

a) être fidèle au cadre déjà défini

Conformément au protocole d’accord, la partie III du document distribué par le Secrétaire Général Trojan le 17 avril 1998 doit servir de cadre à la réflexion du « groupe Williamson ». En effet, le protocole donne le mandat suivant :

"le groupe de réflexion a pour mandat d’examiner la partie III du document du 17 avril ainsi que les éventuelles conséquences à en tirer au niveau de l’Administration et de la gestion du personnel y compris l’étendue du recours à des personnels sous statuts et contrats divers et les problèmes qui y sont liés".

Ce document de la Commission du 17 avril 1998 précise au point III.1) qu'il faut une fonction publique européenne indépendante, permanente et compétente.

De son côté, le protocole d'accord, signé par la Commission et l'ensemble des syndicats, dit :

"La Commission et les O.S.P. réaffirment leur attachement à une Fonction publique européenne indépendante, compétente et permanente et à l’unicité du Statut ainsi qu’au respect des dispositions de l’Accord cadre en vigueur" (Point 1).

"Le maintien d’une Fonction publique européenne forte, compétente, indépendante et permanente est fondamental. Le Statut en est le pilier. Il doit être appliqué correctement." (Point 4.C).

b) se baser sur les problèmes à résoudre

En effet, tout en précisant l'engagement du maintien d'une véritable fonction publique européenne, le document Trojan reste très modéré dans sa formulation et indique clairement, parmi les problèmes à résoudre :

- une hiérarchie lourde,

- des recrutements parfois trop politiques,

- un manque de communication interne,

- des méthodes de gestion financière et de personnel perfectibles.

Sur ces quatre points, qui ont déjà fait l’objet de nombreux diagnostics, le groupe de travail doit fournir des orientations.

Or, la définition des travaux indiquée par son président lors de la première réunion du 30 juin, qui se reflète dans le contenu du rapport intermédiaire, est très restrictive et ne porte que sur des questions ponctuelles, qui ne peuvent être utilement discutées que dans un cadre plus vaste.

 

Vis-à-vis du personnel, la crédibilité du groupe de réflexion dépend de sa capacité à proposer des changements importants dans le fonctionnement de l’Institution, dans des domaines où les décisions dépendent exclusivement de la Commission elle-même.

S’il apparaissait que les discussions n’avaient pour seule finalité que de reprendre des orientations déjà dictées par certains Etats membres, ou même de ne se préparer qu’à une discussion sur certains points du statut avec le Conseil, le groupe de réflexion aurait gravement failli à la mission qui lui a été fixée par le protocole d’accord et, en ce qui concerne le personnel, par les résolutions des assemblées générales.

 

Orientations

Les thèmes de réflexion ci-dessous, définis par M. Williamson, doivent être élargis.

Il y a deux ordres de propositions :

- celles ne nécessitant pas des modifications statutaires;

- celles nécessitant des modifications statutaires.

Le groupe est censé explorer tout d'abord les premières modifications. Le deuxième ordre de modifications pourrait ne pas être nécessaire et, de toute manière, pourrait être mis en examen après avoir testé les modifications qui ne nécessitent pas de modifications statutaires.

a) l’utilisation des ressources humaines

Elle doit inclure la formation, grave problème à la Commission qui recrute des généralistes alors que ses activités sont de plus en plus spécialisées et qui doit développer la cohésion d’un personnel d’origines très diverses :

- formation à l’arrivée

- formation en cours de carrière (on peut spécialiser une partie de notre effectif, ce qui diminuerait la dépendance de la Commission vis-à-vis de certains services des Etats membres)

- formation comme préalable à la nomination sur certains postes, notamment d'encadrement (chef de division);

- répartition des rôles entre les modes de formation (interne, externe et dans certains services des Etats membres)

La planification des carrières ne peut être convenablement discutée en l’absence de données quantitatives, par exemple la probabilité pour un jeune fonctionnaire d’accéder à des fonctions d’encadrement et les données concernant certaines carrières ultra rapides. Avec ces chiffres, on pourra réfléchir au destin à prévoir pour les autres et les modalités à envisager pour leur offrir, à défaut d’un poste de chef de division, des responsabilités en rapport avec leur niveau de qualification et d’expérience. Pour le moment, en termes d’initiative et de responsabilité, l’évolution de la carrière à la Commission se compare défavorablement à celle du secteur privé et des administrations nationales, ce qui explique la croissance de la démotivation avec l’âge.

Les conditions d’accès à la retraite entre 60 et 65 ans sont un aspect du problème de planification des carrières et également d’un autre qui est celui des éventuels dégagements, à traiter sur la base de données quantitatives ;

b) la définition de méthodes d’incitation/sanctions n’est qu’un aspect mineur du problème de l’évaluation des performances :

- des services : la performance individuelle dépend en grande partie de la performance collective ;

- de l'allégement des procédures et de la responsabilisation de la hiérarchie intermédiaire ;

- des individus, y compris les A1 et les A2 qui aujourd’hui ne sont pas notés.

Il n’y a pas de raison de laisser à l’écart de la réflexion le problème de la notation, qui a beaucoup contribué à la crise actuelle, parce qu’on a voulu faire d’un instrument archaïque et scolaire un outil de motivation et de sanction.

c) les dispositions statutaires dépassées

La méthode de travail du groupe doit être de trouver des solutions aux problèmes, notamment ceux soulevés par le document Trojan, et d’examiner ensuite si des modifications du statut sont indispensables pour cela. Il n’y a aucune raison de renoncer a priori et sans contrepartie à des dispositions qui font partie des avantages acquis.

d) l’article 50

La discussion sur les systèmes de retraite a déjà démontré l’existence de dispositions qui ne correspondent plus nécessairement aux besoins. Pour y voir clair, il est nécessaire d’insister une fois de plus sur l’importance de raisonner avec des données démographiques (répartition par âge des fonctionnaires) et un instrument de simulation. Si ces simulations mettaient en évidence la nécessité de faciliter des dégagements, éventuellement avant 60 ans, il serait logique de prendre les dispositions nécessaires pour le faire et en définir les conditions budgétaires.

e) l’article 51

Toutes les réflexions actuelles au sein de la Commission associent directement ou indirectement le licenciement par insuffisance professionnelle au rapport de notation. Or, ni les directeurs généraux (A1) ni les directeurs (A2) ne sont soumis à ce rapport de notation. C'est pourquoi la Commission ferait recours de manière abusive à l'article 50, contrairement aux objectifs de cette disposition, pour se débarrasser de directeurs généraux (A1) et de directeurs (A2) underperforming. Un système ad hoc devrait être étudié et mis en place.

 

S’il est vrai que le temps a manqué pour faire des propositions approfondies, R&D observe que les résultats sont encore très limités et donc décevants.

Ceci rejoint une préoccupation plus ancienne et déjà exprimée par notre syndicat en ce qui concerne la conception restrictive de David Williamson pour délimiter le champ de réflexion du groupe.

Conformément à l’engagement pris dans le protocole d’accord, il est très important que le champ couvre l’ensemble des points évoqués dans le chapitre n°3 du document « La Commission de Demain ».

R&D fera tout son possible pour que le débat du groupe soit élargi et que la réflexion débouche sur des propositions concrètes et novatrices.